Le Débarquement de Cléopâtre à Tarse,
Le Lorrain Claude (dit), Gellée Claude (1600-1682),
(C) RMN / Stéphane Maréchalle
Entre Nature et idéal, le paysage à Rome entre 1600 et 1650.
Oui, on peut dire que le thème n'est pas l'un des plus aguicheurs qui se soit fait au Grand Palais. La scénographie non plus, sans doute.
Mais elle est belle, vraiment.
Je vous dit ça avec beaucoup de sincérité, c'est une exposition qui ne fait pas seulement du bien aux yeux, elle élève l'âme.
Partir à la découverte des tâtonnements de la peinture italienne du début du XVIIème siècle, la mise en place du paysage classique, c'est comme arpenter un chemin en pleine montagne : c'est un peu laborieux parfois, mais la vue, à la fin, elle vaut vraiment le coup.
Alors si vous avez l'occasion, profitez d'un moment de calme entre midi et deux par exemple, quand il n'y a presque personne, pour parcourir les deux étages de cette exposition.
Et laissez Annibal Carrache vous convaincre qu'il n'y a rien de plus beau que la nature, Paul Bril vous emporter au fil des mâtages de ses marines et dans le vert limpide de ses mers, L'Albane et le Dominiquin se partager l'héritage du Carrache en deux part presque égales et si différentes!
Avec la petite exception d'un Velasquez, qui illustre avec délices la dolce vita italienne aux abords des cyprès de la villa Médicis.
Surtout, surtout, approchez-vous des œuvres.
Juste pour le plaisir de découvrir, à côté des peintures sur toile ou sur bois, une technique extraordinaire : la peinture sur cuivre.
Ce n'est alors presque plus de la peinture, c'est de l'émail, d'une délicatesse, d'une finesse, avec des couleurs sensibles et vraies qu'aucune toile ne permet...
C'est là seulement que vous pourrez découvrir la profondeur des verts, la limpidité des eaux, la transparence des ciels...
A l'étage, pour passer vite sur le charme des dessins et croquis et de la reconstitution d'une architecture en trompe l'œil d'un palais romain, vous découvrirez les deux références du paysage classique : Poussin et le Lorrain.
Poussin, c'est la construction de la beauté idéale, petit à petit, coup de pinceau après coup de pinceau. C'en est presque laborieux, mais c'est sublime. Les personnages figés, les arbres sans un souffle de vie, qui révèlent le sens profond du tableau. Parce que chez Poussin, attention, tout a un sens.
Alors n'hésitez pas, vous pouvez y passer du temps. Relevez chaque détail, comment le cortège est fait à Zeus dans le tableau des funérailles de Phocion, comment le cercueil qui lui est refusé est placé exactement à son aplomb, comment le chemin vous mène, tranquillement, au travers du tableau.
Alors oui, Poussin n'est pas accessible à tous.
Mais, comme pour compenser, en face, il y a le Lorrain.
Et là, quelque soit la connaissance de l'histoire, de l'histoire de l'art ou des auteurs grecs auxquels il fait référence que vous ayez, il n'est pas possible de ne pas juste se laisser happer.
Sa douceur, sa lumière, sa sensibilité, et le tout au milieu de paysages grandioses, c'est... non, définitivement, je n'ai pas de mots pour ça, c'est trop beau.
C'est beau comme un délicieux gâteau dont on sent l'odeur avant de le goûter (et le Lorrain était apprenti pâtissier avant de devenir peintre) : on sent sa lumière plus qu'on ne la goûte.
En bref, c'est une exposition dont on se délecte...
D'ailleurs, si le Lorrain vous a fasciné, le Louvre propose de continuer la visite avec ses dessins : une exposition qui ouvre bientôt !
D'ailleurs, si le Lorrain vous a fasciné, le Louvre propose de continuer la visite avec ses dessins : une exposition qui ouvre bientôt !