mardi 10 mai 2011

Rembrandt et Le Lorrain au Louvre...

Claude Gellée, Dessinateur à Tivoli 
© Haarlem, Teylers Museum
et
Rembrandt, Tête du Christ, huile sur bois, 
Berlin, Gemäldegalerie, Staatliche Museen zu Berlin, inv 811c © BPK, Berlin, 
Dist. RMN / Jörg P. Anders

Deux expositions très différentes l'une de l'autre viennent de s'ouvrir au Louvre... pour ne pas dire différentes à l'extrême !

Pour commencer, une remarque de râleuse : je ne comprends pas le marketing du Louvre : autant les affiches pour l'exposition Rembrandt sont sublimes et visibles partout dans le métro autant celles du Lorrain... ne sont pas à la hauteur de son art et bien cachées !

M. Dagen en parle sans doute mieux que moi, dans son article du Monde du 4 avril (déjà en archives, malheureusement). Il raconte sa déception d'avoir mis ces deux expositions l'une en face de l'autre, la difficulté d'aborder le Lorrain lorsque l'on vient de voir Rembrandt.

Je ne proposerai qu'une chose : commencer par le Lorrain.

Bon, évidement, venant d'une grande fan du Lorrain, cela ne vous surprendra pas. 
Mais je pense qu'il a raison lorsqu'il parle des émotions radicalement différentes que l'on peut ressentir face à ces deux expositions.
Le Lorrain, c'est la douceur, la contemplation, une manière de s'abîmer dans chaque détail de la nature.
Alors que Rembrandt, c'est explosif. C'est se laisser emporter par ce que l'on ressent devant la luminosité si particulière et proche de la religion de ses Christs.

Donc, un conseil : profitez d'abord du Lorrain.

M. Dagen dit qu'avec l'exposition Nature et Idéal qui se tient au Grand Palais en ce moment et qui expose déjà des tableaux de cet artiste et celle-ci, on risque de se lasser.
Je ne suis pas d'accord, mais alors pas du tout !
En fait, je pense même tout le contraire : ces deux expositions sont remarquablement complémentaires. Et je suis ravie que le Louvre et le Grand Palais exposent sur les même dates sur ces deux sujets si proches !
Au Grand Palais, c'est la grande peinture d'une époque, celle des commanditaires et des palais romains, et l'on ne voit que cet aspect de la peinture du Lorrain, qui n'est d'ailleurs pas le seul représenté à cette exposition.

Alors qu'au Louvre...
Là, ce sont les dessins, les techniques adoptées l'une après l'autre par cet artiste brillant, quelques peintures tout de même pour voir comment ces techniques ont influé sur sa peinture. Découvrir que même dans ses croquis il arrive à rendre toute la luminosité d'un paysage et ce quelle que soit l'heure du jour, c'est merveilleux !
Ce qui est remarquable, c'est de suivre toute la carrière de l'artiste, depuis les maladresses du début jusqu'à la toute fin où l'on sent que l'adresse comme la vue ont baissées, en passant bien sûr par l'apogée de sa peinture.
Ces paysages à la luminosité dense et qui transperce encore les yeux même alors qu'il ne s'agit que de peinture... et puis les différents recueils de dessins, dans la campagne romaine, ou le Liber veritatis, recueil de toutes les commandes qu'il a pu avoir pour pallier les contrefaçons...
Il y a vraiment un grand nombre de choses à découvrir !

Et après, alors que l'âme est apaisée par la douceur du Lorrain, on peut s'aventurer dans la spiritualité de Rembrandt.
La première salle sert à se re-familiariser d'abord avec ses peintures, c'est essentiel, c'est comme reprendre contact avec un vieil ami que l'on a toujours admiré, retrouver ces nuances et cette lumière, si différente de celle du Lorrain, c'est bien vrai.
En réalité, dès ce moment-là, on se laisse posséder entièrement par la lumière de Rembrandt. Celle qui semble venir non pas de la peinture, mais de derrière la peinture, comme si elle venait d'ailleurs.

Le point de départ de l'exposition est presque anecdotique : lors de l'inventaire après décès de Rembrandt, le titre de l'un des tableaux parle d'un Christ "d'après nature".
Comment représenter le Christ d'après nature ? Pourquoi Rembrandt utilisait ce terme ? 

Ça y est, le thème est lancé : comment représenter le Christ ?
Vous le découvrirez dans l'exposition. Du XVIème au XVIIIème siècle, avec au passage quelques gravures de Dürer.

Et puis on revient doucement à Rembrandt, avec quelques esquisses, des portraits... notamment des portraits de "jeune juif", qui ressemblent à s'y méprendre... au Christ.
Après tout, pourquoi pas ? Quel meilleur moyen de représenter Jésus "d'après nature" que de s'inspirer d'un jeune juif, puisque lui-même l'était ?

C'est brillant, mais le plus important, c'est cette lumière qui nous indique, au fur et à mesure que l'on avance dans les portraits, qu'il ne s'agit plus d'un simple jeune homme mais bien du fils de Dieu.
En quelques coups de pinceau, un peu plus épais et plus blanc sur les joues et le bas du front, de gros coups autour de la tête qui laissent transparaître la sous-couche orangée, comme si l'auréole était sous-entendue...

Voilà, alors si en sortant de tout cela vous n'êtes pas épuisé... je vous dis bravo ! :)

vendredi 6 mai 2011

Itinéraires.


Oui, une fois n'est pas coutume, je vais vous parler d'un restaurant.

J'y avais déjà mangé, j'avais été ravie, mais j'avoue que la dernière fois nous avons tous été bluffés.

C'est vraiment délicieux.
Bon, c'est de la vraie gastronomie avec les prix qui vont avec, mais si vous voulez un vrai bon restaurant haut de gamme, n'hésitez pas, il est magique !

Pensez juste à réserver avant, surtout si vous y allez un samedi, parce qu'il y a du monde !
(En plus la jeune femme qui vous répondra est charmante et arrangeante)

Pour plus de renseignements, leur site est joli et bien fait, même si je crois qu'il n'est pas encore tout à fait complet.

D'abord, quand vous arrivez, le lieu est joli. Ambiance tamisée, pierres aux murs et tentures gris taupe chiné, c'est chaleureux et accueillant.
La table est simple est joliment dressée avec une belle boite contenant un bon pain. Simple et classe.

Nous, on a tous pris le menu découverte. Trois petites entrées découvertes, un plat principal et un dessert ou fromage.

Le tout étant une surprise, il faut juste préciser s'il y a quelque chose que vous n'aimez pas ou auquel vous êtes allergique (et ne vous fiez pas aux assiettes des voisins, il nous a semblé que le menu changeait pour chaque table !). Moi par exemple, j'ai été obligée de dire que le foie gras et les huitres étaient à éviter... donc le menu à été adapté pour moi, étant donné que le foie gras était prévu !

Les entrées étaient toutes plus délicieuses les unes que les autres, avec une mention spéciale pour les oignons confits...

Mais le plat principal !
De la dinde tendre, mais tendre... et accompagnée d'une purée. Enfin, une purée... disons que ça ressemblait plus à une émulsion de pomme de terres à la crème tant c'était léger ! Un vrai délice...

En revanche, petit bémol sur le dessert : c'était bon, mais pas aussi raffiné que le reste... j'aurais plutôt tendance à conseiller le fromage, servi sur une simple planche d'ardoise. C'est joli, original, et aux échos que j'ai eu, très bon !

Enfin voilà quelques ingrédients d'un dîner d'exception bien réussi...

mercredi 4 mai 2011

L'objet photographique : une invention permanente.

 
Nadar (Félix Tournachon)
© Musée Carnavalet / Roger-Viollet

L'invention de l'objet photographique, voilà l'exposition qui manquait à la photographie, et qui vient d'ouvrir à la MEP.

Que l'on s'y connaisse ou non, on apprend quelque chose, on découvre autre chose et, dans tous les cas, on s'en met plein les yeux.
Au milieu des chemins sombres nécessaires à la conservation, parfois derrière des rideaux ou à éclairer soi-même, tirés sur métal, sur verre, sur papier ou montés, un hymne à toutes les photographies s'ouvre à vous...


Moi qui n'y connais pas grand chose, j'ai adoré découvrir. Les techniques photographiques, les négatifs, les positifs, les tirages... et ce, jusqu'au numérique. Les panneaux d'explication sont bien faits, même s'ils manquent à mon goût d'explications très poussées qui rentreraient dans la chimie des matériaux.


Savoir comment la lumière peut mordre le métal, le verre ou tout autre support grâce à des composés chimiques, collodium, argent, m'a toujours fasciné.
Voir les daguerréotypes, ces drôles de "miroirs" qui transmettent les souvenirs, c'est voir son propre reflet devant l'histoire, les bouts du passé...
Et découvrir l'ambrotype, figé et retravaillé dans les détails d'un bracelet ou d'un ciel, le négatif sur verre rouge qui donne une vraie profondeur aux noirs proche de l'émail...
Même les diapositives sont éclairées par en-dessous, délicatement mises en valeur.


Savoir comment d'un négatif on tire un positif, savoir quelles sont les différences entre les techniques de tirage...
Ceux d'henri Cartier Bresson, bien sûr, mais même les tirages de la photographie journalistique, avec le sous-entendu lancinant : art ou par art ?

Mais il faut surtout se laisser guider le long du parcours, prendre son temps et le remonter jusqu'à nous, jusqu'aux dernières techniques, jusqu'aux dernières expérimentations, les tirages limités aux techniques brevetées et secrètes, parfois même épuisées...

A mentionner, le photographe George Rousse. Juste parce que j'ai eu un vrai coup de foudre pour son oeuvre. C'est un vrai choc à la fois esthétique et intellectuel. Optique, en somme.


Mais avant tout, voici une exposition du dialogue.
Le parcours est à la fois chronologique bien sûr, pour nous guider au travers de l'évolution de la photographie, mais aussi thématique, pour éclairer les différentes techniques.
Ainsi, le dialogue se fait entre les différentes techniques, entre les originaux et les reproductions, entre les négatifs et les positifs, entre les diapositives et les tirages, entre les différents tirages même...

Mais, comme si cela ne suffisait pas, Anne Cartier-Bresson a décidé de faire dialoguer le passé et le présent. Les pionniers de la photographie et les artistes contemporains qui ont repris leurs techniques. Un dialogue riche et envoûtant, parfois choquant, mais toujours intéressant.


Bref, je crois que j'y retournerai avec un peu plus de connaissances techniques pour vraiment l'apprécier dans tous ses détails !

Qui vient avec moi ?

dimanche 1 mai 2011

L'épée. Usages, mythes et symboles.

Epée du sacre des rois de France : Joyeuse ou épée de Charlemagne,
Trésor de l'abbaye de Saint-Denis. 
Pommeau : 10e-11e. Quillons : 9-10e et 12e. Fourreau : 13e-début 14e siècle

mercredi 27 avril 2011

Petite escapade à Marseille...

Encore une fois, je n'ai pas trouvé les droits, donc si vous les avez, n'hésitez pas à me les communiquer !

Je suis une vraie parisienne, certes, mais cela ne m'empêche pas de sortir de ma ville de temps en temps...

Il y a quelques temps, j'étais à Marseille, et si vous ne connaissez pas la ville, je vous conseille vraiment d'y faire un tour !
(Bon, c'est encore mieux si vous avez des amis là-bas qui vous font découvrir tous les bons coins et surtout les bons restaurants comme chez Sauveur.)

Je ne suis pas restée longtemps, j'ai à peine aperçu le Panier de la ville, mais j'y ai vu la Vieille Charité.
Et, outre le fait que cela faisait longtemps que j'avais envie d'y aller, j'ai été ravie.
Ne serait-ce que pour l'architecture. C'est un ancien hôpital pour pauvres et mendiants, donc les espaces sont grands (un peu dans la même veine que l'hôpital des Invalides), mais très sobre, sans aucune fioriture, ce qui donne une grande majesté à l'ensemble.

Nous ne sommes pas encore au cœur de la saison touristique,et de nombreuses salles sont malheureusement fermées pour manque d'effectifs, mais du coup la visite n'est pas trop fatigante, surtout quand la chaleur commence à pointer son nez.
Les collections d'antiquités égyptiennes sont très belles et assez complètes (une présentation détaillée ici). C'est Clot-Bey, un grand collectionneur du XIXème siècle, qui en a rassemblé une grande partie, et la dernière salle porte son nom.
C'est un parcours thématique assez complet, avec de beaux objets même si beaucoup sont tardifs, dont le principal défaut est que les cartels ne sont pas très détaillés...
En parallèle, la Vieille Charité organise régulièrement des expositions temporaires. J'ai hâte de revenir en été pour voir les prochaines, surtout qu'il paraît qu'à cette occasion, de l'art contemporain envahit la magnifique chapelle XVIIème qui trône au centre de la cour et dans laquelle nous n'avons pas pu entrer !


Il y avait néanmoins une remarquable petite exposition temporaire qui avait pour but d'expliquer tout ce que l'on sait sur un objet de leurs collections américaines : un crâne du Brésil de la collection du docteur Gastaut. L'exposition s'intitule "Xihitl, le bleu éternel".
Ne suivez pas forcément les indications des gardiens quant au sens de circulation de l'exposition, ce n'est pas toujours très clair... il semble qu'il y ait une vidéo explicative qui passe à heures fixes mais que nous n'avons pas pu voir.


La scénographie est superbe, très sombre et mystérieuse, elle nous entraîne dans le climat d'enquête qui est le fil conducteur de cette exposition : d'où vient ce crâne ? A quelle civilisation appartient-il ? Quelles en sont les composantes scientifiques ? Et surtout, surtout, est-ce un vrai ou un faux ?
Que de questions auxquelles les scientifiques tentent de nous répondre et qui nous amènent inexorablement vers la salle dans laquelle est exposé ce crâne, très bien mis en valeur.


Et dehors ce sont les vieilles rues du Panier (attention, rien n'est droit dans cette ville), et l'on peut déambuler jusqu'au port.


Plus tard, nous sommes allés à la cité radieuse.
J'avoue que l'exposition Perriand m'avait donné envie de voir quelques créations du Corbusier, et la cité "du fada", comme disent les marseillais en était l'occasion.
Elle n'est pas en très bon état, mais on voit bien les idées de modulation et de rentabilité du créateur, même si j'aurais aimé pouvoir visiter l'un des appartements pour mieux en prendre conscience. 
Il parait que le restaurant vaut le coup, ou au moins la buvette pour la vue, mais le plus impressionnant c'est la terrasse. En béton, simple, claire, au design épuré et légèrement fantaisiste, avec une vue sur le tout Marseille, ça donne envie de s'y reposer quelques instants...


Voilà, et pour finir le tour sur l'Estaque, que j'ai été ravie de découvrir en vrai, étant donné que je n'en connaissais que les tableaux de Braque et Cézanne (ici), où vous pourrez vous balader en dégustant les spécialités du coin : des panisses et des chichi-fregi...

mardi 26 avril 2011

Dogon*

Les expositions du Quai Branly...
Depuis le temps que j'entends dire qu'elles sont super, et qu'il faut absolument que j'y aille,  j'ai enfin franchi le pas avec l'exposition Dogon !

Il fallait que j'en ai le cœur net : ces expositions sont-elles si fabuleuses que ça ?

Alors entrons dans l'exposition sur ce peuple d'Afrique que l'on appelle les Dogons, qui vit sur le territoire du Mali actuel, à l'ouest du Sahara, sur une terre de sécheresses.
Enfin, les Dogons... il semble qu'il y ait les pré-dogons aussi, et puis d'autres peuplades comme les Tellem...
En fait, lorsque vous arrivez dans la première très grande salle, selon le principe du Quai Branly, il faut suivre un trait au sol qui vous indique les différentes peuplades et leurs œuvres, donc on se laisse guider.

Cette salle est magnifique. L'effet de toutes ses sculptures de bois est superbes, et l'éclairage les met remarquablement bien en valeur.
Et tant mieux, car les œuvres sont superbes !
Des cavaliers aux tempes scarifiées et aux chevaux extrêmement réalistes, des personnages aux bras levés qui appelaient sans doute la pluie, des maternités, des jumeaux... toutes sont le plus souvent recouvertes d'une pâte qu'ils désignent comme "croûteuse". Et, effectivement, on le voit notamment sur les sculptures Tellem, la pâte toute craquelée masque en partie les sculptures.
Mais là, première déception.
Je ne sais pas, c'est peut-être moi qui ai mal lu les panneaux, mais la pâte croûteuse... c'est quoi ?
Non, parce que les cartels se limitent à bois + pâte croûteuse. Un peu léger.
Et quelle est la signification de cette pâte ?
Alors là, merci mes cours de l'École du Louvre : il me semblait me rappeler qu'il s'agit de pâtes rituelles, parfois constituées d'huile de palme (c'est facile à retrouver, certaines statuettes suintent littéralement), de sang d'animaux et d'excréments de chauve-souris...
Et j'en ai eu la confirmation par... le livret pour enfants !
(Ne jamais oublier de faire les jeux du livret pour enfants, on apprend parfois plus et mieux qu'en lisant les panneaux. En tout cas, celui-ci est très bien fait)
Il s'agit donc d'une pâte rituelle faite d'huile de palme, de sang d'animaux, de farine de mil et qui ont parfois été recouvertes involontairement par des excréments de chauve-souris...

Enfin, ce n'est qu'un exemple et il y en a d'autres (un pilier de cheval en forme de toguna... vous savez ce que c'est qu'une toguna, vous?), mais j'avoue qu'en dehors de l'admiration que m'inspirent les objets, j'ai été prise d'un profond malaise devant les panneaux (et en écoutant les nombreuses conférencières qui passaient à proximité) : ils expliquent la géographie, l'histoire un peu, les mythes, parfois, mais en ce qui concerne les œuvres, ils... décrivent.
Ils n'expliquent pas.
Pourquoi ne pas expliquer la pâte croûteuse ?
Mais pourquoi ne pas expliquer la société autour, sa hiérarchisation ?
Et surtout le sens de chaque statue ? 

Mon malaise est venu de l'impression qu'en fait, on ne savait vraiment pas grand-chose de ces peuples et de cet art.
Je sais que ça arrive souvent en histoire de l'art, et a fortiori en archéologie, mais ce que je ne comprends pas, c'est pourquoi tenter de le cacher par des descriptions interminables ?

Je sais que je suis sévère, mais c'est rare qu'une exposition me mette aussi mal à l'aise. Peut-être que, n'étant pas familière des arts d'Afrique, j'ignore que, sachant que l'on ne sait pas grand-chose, on essaie de meubler ailleurs...

Heureusement, la suite est beaucoup plus claire.
On entre dans l'univers des premiers explorateurs qui sont arrivés en pays Dogon, leur fascination pour les masques très impressionnants et très bien présentés.
Donc les informations sont plus présentes.

Et la suite est encore plus belle : la scénographie a recréé les appartement de ces collectionneurs, et nous parle du quand et du comment ces objets sont arrivés sur le marché de l'art.
Et on y trouve même quelques explications qui nous manquaient dans la première salle (oh, une toguna !) !

Voilà, il semble que je ne puisse pas être enthousiaste à chaque fois...
Dommage, parce que visuellement et en ce qui concerne la scénographie, c'est vraiment une exposition remarquable !

vendredi 22 avril 2011

La délicatesse.


Je sais que je n'apprendrai rien à certains d'entre vous en parlant de ce drôle de livre qu'est La délicatesse de David Foenkinos. Ce livre a en effet eu pas moins de dix prix littéraires, et a été traduit dans de nombreuses langues.

Mais c'est un livre... délicat.
Oui, je sais, ça peut paraître idiot, mais c'est exactement ça.

L'écriture est légère et fine, comme un tissu qui vous enveloppe et vous guide dans l'histoire et sur les pas de l'héroïne, Nathalie. Ah, Nathalie... un vrai profil d'héroïne, une vraie simplicité, une grande finesse... elle aussi est délicate.

Mais s'il n'y avait que ça, ce serait trop simple.

Non, au bout de quelques pages, alors que le style reste presque excessivement léger, le sujet devient lourd, violent.
Et puis c'est la bataille pour que la vie reprenne son cours qui est à peine survolée. On a trop l'habitude de s'appesantir sur la complexité des sentiments pour être familier de cette manière de faire qui parait presque superficielle, mais qui en devient presque un soulagement.

Et puis, au milieu de ces lignes si délicates que l'on hésite presque à tenir le livre bien fermement, de temps en temps, un paragraphe, une phrase, un mot qui accroche.
Qui nous retient par sa vérité, par son humour absurde (les notes de bas de page sont un vrai délice) ou par sa violence.
Et sitôt après, tout redevient lisse, comme pour nous rassurer, panser la blessure, nous replonger dans la douceur inodore de ce livre un peu moelleux.

Et c'est curieux mais ça m'a tenue en haleine.
Je l'ai terminé en quelques jours, presque sans être capable de le lâcher.
Pas parce que j'avais envie de connaître la fin, mais parce qu'il est envoûtant, et que l'on a envie de se retrouver dans cet univers, encore et encore. De s'éclipser quand sa vie râpe un peu trop.

Avec une drôle d'impression à la fin : c'est déjà fini ?
Une belle incursion dans un univers délicat, et ça fait du bien.

Merci à celle qui me l'a fait découvrir !

mardi 19 avril 2011

L'Éclat de la Renaissance italienne

Triomphe de Minerve (détail)
D’après Giovanni da Udine, Triomphe des dieux, Détail du triomphe de Minerve, tissage vers 1560, Paris, Mobilier national
© P. Sébert

J'avoue que les tapisseries sont l'un de mes péchés mignons, et les manufactures des Gobelins en particulier.

Si vous en avez l'occasion, n'hésitez pas à aller visiter les ateliers où travaillent les lissiers, c'est fascinant de voir ces artistes en plein travail (pour les renseignements sur les manufactures, c'est ici).

En parallèle, régulièrement, la galerie organise des expositions qui ont pour but d'exposer les produits du mobilier national, et particulièrement des manufactures.


Alors, comme le disait M. Goetz au vernissage : "Que de merveilles !"


Et c'est vrai.


Pour sa dernière exposition, M. Brejon s'est beaucoup investi, et il nous propose une exposition faite avec amour et enthousiasme.


Toutes ces tapisseries nous transportent dans les palais vénitiens et florentins des débuts de la Renaissance, avec des espaces grandioses et immenses habités par des tapisseries signées par Raphaël et ses suiveurs qui dialoguent avec des tapis persans aux motifs exquis, de la majolique et des vases de Sèvres...
Et pour une fois, cette exposition nous présente des tapisseries dans un ensemble (dit tenture), car on ne concevait que rarement une tapisserie seule !


J'hésite à dire qu'il y a très peu de tissages originaux dans cette exposition, avec la peur que cela lui porte préjudice...
Mais pour moi, c'est au contraire une richesse : on découvre dans cette galerie comment chaque époque qui a suivi la Renaissance a choisi de retisser et de réinterpréter ces œuvres.
Le XVIIème, en particulier, est très présent, avec des retissages proposés par Le Brun (alors directeur des manufactures des Gobelins) dont on retrouve la patte un peu partout : Le Brun jeune, grandiose pour ne pas dire grandiloquent, puis Le Brun plus âgé, comme assagit.
Mais cela va même jusqu'au XIXème, qui se voit immédiatement quand on monte les escaliers, la facture néoclassique des retissages de fresques de la Farnèsine sur la demande d'Ingres rappelle trop leur commanditaire !


Mais le parcours n'est pas organisé de manière chronologique autour de ces diverses manières de réinterpréter la Renaissance, car le propos est axé sur cette période en elle-même : quels sont les grands chefs d'œuvres qui ont définitivement marqué l'histoire de la tapisserie ?
Ils sont presque tous là.


On commence en bas par Raphaël et son œuvre majeure qui annonce la Renaissance dans l'art de la tapisserie : la tenture des actes des apôtres. L'iconographie est riche, et l'on découvre même deux épisodes qui y ont été ajoutés par le XVIIème : la lapidation de Saint Etienne et la conversion de Saül, celui qui avait lancé la première pierre.

Une petite (oui, enfin, en tapisserie le "petite" est relatif) œuvre maniériste d'après Vasari reprend le thème de l'âge d'homme et rappelle la galerie de Fontainebleau, les travaux du Primatice et de Rosso.


La mise en perspective est assurée par le seul tissage florentin de la galerie, qu'il faut contourner pour voir la suite de l'exposition.


Et derrière, un choc esthétique : la bataille de Constantin.
Une merveille, d'une richesse, avec une multitude de détails à voir et à déchiffrer.
Le dessin original était de Raphaël, le carton et l'exécution initiale de son meilleur élève, Jules Romains, et le tissage est signé Le Brun jeune.
Et ceux qui connaissent Le Brun le retrouve tout à fait ici, alors qu'on est juste quelques années avant la galerie des glaces, quelques années avant les gigantesques triomphes d'Alexandre du Louvre.
Et là, tout s'éclaire, c'est évident ! Si l'on s'était un jour demandé où Le Brun avait trouvé son inspiration, sa grâce, son sens de la mesure, aussi bien que le côté grandiose et torturé de ses compositions, ce tableau nous en donne la réponse.
Cette commande combinée de Mazarin et de Fouquet lui aura servi à alimenter sa peinture !


En face, c'est l'histoire de Vulcain qui se déroule sous nos yeux, et qui avait appartenu à la collection personnelle de Fouquet et qui avait tant plu à Louis XIV.
Si les couleurs de ce tissage flamand n'ont pas toujours très bien tenu, le modelé des corps et le fond architectural sont en revanche toujours bien présents.
Ici, l'on peut même s'amuser à trouver dans un coin Vénus et Mars au lit découverts par Vulcain qui s'apprête à les recouvrir d'un filet...


Puis c'est l'escalier où nous attends la personnification alanguie de la rivière de la Bièvre, qui alimentait les manufactures, avant de nous guider vers d'immenses formats qui ornaient les loges du Vatican et, tout en haut, les deux tapisseries ingresques aux sujets mythologiques.


Et cette salle du haut !
Pour une fois, tout l'espace de la galerie est dégagé, pas de cloisons qui entraveraient le chemin, on se croirait vraiment dans un palais habité de tapisseries, avec la possibilité de prendre le recul que l'on veut pour voir ces très grands formats.
C'est dans cette salle que l'on peut admirer le triomphe et la postérité de Raphaël au travers de ses élèves, chacun ayant pris une partie de très différente de son héritage.


D'abord, c'est l'ensemble des Fructus Belli, les fruits de la guerre : mort, viols, incendies, rapts... mais aussi récompenses et triomphes, représentés par Jules Romains d'une manière grandiloquente, avec des bordures qui empiètent sur le motif. C'est riche et extrêmement moderne !
Et surtout, ce qui vaut la peine ici à mon avis, c'est le détail des rouges. Ici, ils sont très bien conservés, et l'on voit bien la différence entre le rouge-orangé tiré de la garance et le rouge-violacé tiré de la cochenille.


Enfin, l'autre tenture, seul tissage d'origine, est faite d'après un dessin de l'autre grand élève de Raphaël, qui a, quant à lui, développé un côté majoritairement ornemental : Giovanni da Udine.
D'un côté chaque saynète vous rappelle l'histoire de Persée aux multiples épisodes, tandis que de l'autre vous trouverez une bacchanale avec une multitude de petits amours qui travaillent le raisin et le vin, le tout entouré de grotesques.
Eh oui, ces grotesques qui tiennent leur nom de la redécouverte des peintures de la domus aurea, que l'on a pris pour une grotte !


Enfin bref, une exposition pleine d'émerveillements comme seule la tapisserie sait nous en réserver.


vendredi 15 avril 2011

Charlotte Perriand (1903-1999) : de la photographie au design

 Je n'ai pas trouvé les droits de cette photographie, donc si quelqu'un trouve, je suis preneuse !
Bon, décidément, j'ai du mal à m'en tenir à un billet par semaine en ce moment, il y a trop de nouvelles expositions qui ouvrent !

Et puis celle-ci, c'est parce que l'occasion c'est présenté que je suis allée la voir.

Et je n'ai pas regretté.

Si vous avez envie de savoir un peu plus qui est Charlotte Perriand, je vous laisse découvrir le dossier pédagogique fait par Beaubourg en 2005/2006 (ici).

Bon, la première partie de l'exposition est dans les salles avec les œuvres du parcours permanent du Petit Palais, et là, il y a moyen de se perdre. Facilement. 
Je vous conseille donc de télécharger le plan d'aide à la visite avant d'y aller (ici).
Ou de prendre le plan distribué à l'entrée en arrivant, ça marche aussi.

Mais en haut, je vous conseille surtout de profiter de l'immense travail de l'équipe du Musée Nicéphore Niepce de Chalon-sur-Saône, qui a recréé des maquettes et des panneaux de photomontages des années 30 très impressionnants, en s'inspirant des travaux de Fernand Léger qui y avait collaboré.
Vous verrez, en matière de graphisme et d'impact de l'image, c'est bluffant de voir à quel point on utilise toujours les même ressorts !

Dans le couloir qui expose du mobilier, quelques meubles dessinés par Charlotte sont malheureusement assez mal mis en valeur au milieu des meubles et des tapisserie des XVIIIème et XIXème siècle que renferme le musée.

En bas, c'est un vrai labyrinthe.
Si vous arrivez à ne pas (vous) perdre de vue au milieu des tableaux les œuvres photographiques et celles de design, normalement vous allez aboutir au vrai cœur de l'exposition.

Enfin, tout de même, dans le lot, on découvre une photographe assez formidable. J'ai surtout été marquée par des photographies d'architectures, avec un sens de la lumière et du cadrage assez exceptionnels.
Et puis une volonté de photographier des objets. N'importe lesquels, même juste ramassés par terre, pour les mettre dans la maison.
Ouvrir la sphère de l'intime à la photographie en détrônant les œuvres d'art. Rendre accessible à tous la beauté.

Et puis une fois au cœur, si comme moi vous avez perdu beaucoup de temps à vous perdre un peu partout avant, vous allez le regretter un peu.

Parce que c'est là que tout commence, que tout est à voir, à comprendre, à percevoir, à apprécier.

C'est trop riche et trop dense pour que je puisse vous en donner un aperçu ici. Mais il y a de quoi s'en mettre plein les yeux.
De quoi comprendre les rapports étroits entre la nature, la photographie, la peinture, le design, l'architecture... qui existaient à partir des années 30.
On y retrouve l'ergonomie, le confort, mais aussi les démarches de démocratisation de l'art et de rentabilité de l'espace que l'on connait mieux chez Le Corbusier, que l'on découvre même peintre à l'occasion.

Et enfin, à la sortie de l'exposition, n'hésitez pas : Cassina, le partenaire de l'exposition, met à la disposition des visiteurs tout une série de meubles de Charlotte Perriand. On peut regarder, toucher, et même s'assoir dans les fauteuils et les chaises longues !

C'est assez rare pour être signalé et apprécié !

mardi 12 avril 2011

Une cour royale en Inde : Lucknow (XVIIIème siècle - XIXème siècle)

 Le Colonel Antoine-Louis Polier assistant à un nautch, d’après une peinture de Johann Zoffany, 
Inde, Uttar Pradesh, Lucknow, vers 1786-1788,
©Foto Rainer Wolfberger, courtesy Museum Rietberg, Zürich

 Je ne connais pas grand-chose aux arts asiatiques, mais je tenais absolument à voir cette exposition, dont j'avais entendu le plus grand bien.

Et puis bon, ce n'est pas l'aperçu que m'en donnait le musée Guimet qui allait me permettre de me faire une idée...


J'étais ravie mardi dernier de me rendre au vernissage, ce qui m'a donné l'occasion de retourner au musée Guimet dont j'apprécie les grands espaces et la présentation simple et claire dont se dégage une grande sérénité.


Le musée a décidé de se pencher cette fois sur une ville d'Inde du nord, Lucknow, dont je ne savais rien avant de commencer l'exposition. D'ailleurs, après quelques recherches, j'ai cru voir que les guides de voyages pour l'Inde n'ont pas l'air particulièrement enthousiastes vis-à-vis de cette ville.


Donc, vous l'aurez deviné, c'est une exposition de spécialistes, aux panneaux pas forcément très compréhensible pour quelqu'un qui comme moi ne s'y connait pas bien.
Il est vrai que c'est dommage, mais l'exposition a d'autres avantages.


Si vous n'avez pas l'occasion de voyager, de partir en vacances en ce moment, cette exposition vous offre une porte sur l'extérieur, sur l'Inde mystérieuse aux multiples richesses...


C'est en effet grâce à la scénographie de Giada Ricci que l'on peut se laisser porter le long de la rivière Gomti qui partage la ville en deux. On s'imagine sur un bateau qui slalome (c'est moche mais c'est dans le dictionnaire) entre les ilôts/vitrines peuplés de riches objets, tandis que sur les côtés, les personnages principaux et les palais du bord de l'eau se laissent découvrir...


Au milieu du bleu ambiant, on finit par se laisser envoûter par le charme délicat et exotique des dessins, peintures et enluminures, à la découverte des objets de pouvoir de cette drôle d'élite d'une ville qui en peu de temps surpasse Dehli en puissance et en richesse. Une masse d'armes, notamment, impressionne car tout y inscrit l'instrument de pouvoir.
On se familiarise avec les architectures qui nous rappellent nos palais des milles et une nuits, et l'on continue le voyage au gré des costumes et instruments d'apparats, tous plus dorés les uns que les autres.
Je vous laisse y découvrir notamment un superbe turban rouge et or, ou une coiffe de prince rebrodé de perles et d'émeraudes.


Le long du couloir comme le long du fleuve arpenté par des navires en forme de poisson, le voyage continue.


Puis on arrive chez les collectionneurs.
Ces curieux nawabs blancs qui s'habillaient et se comportaient comme les riches indiens, qui avaient recours aux meilleurs artisans et peintres pour se créer des collections d'exception.
J'ai une grande tendresse envers les collectionneurs, et ceux-là ne dérogent pas à la règle. Ils ont cette manière touchante de faire marquer les objets à leur noms pour bien en indiquer la possession (une paire de superbes pistolets en témoigne), et cette volonté de diffuser, de partager leur monde.
Une des pièces maîtresse de l'exposition est un bouclier offert par l'un d'eux au Prince de Galles, qui vient de la collection privée de la Reine d'Angleterre. Il est étincelant, en laque incrusté de diamants...


Enfin, la dernière étape du voyage se fait sur une robe de courtisane d'une grande richesse, et, surtout, sur des bijoux.
Tout au long de l'exposition, les portraits de femmes sont riches de ces bijoux, et on peut enfin les voir. Et on est pas déçu, ils sont superbes !
Et puis, un petit extrait de film pour achever de se mettre dans l'ambiance...


Dernière étape? Pas tout à fait : pour terminer sur la ville de Lucknow, une autre exposition est cette fois présentée dans la rotonde, tout en haut du musée.
La vue vaut le coup quand on monte, c'est vrai, mais surtout les photographies en noir et blanc sont superbes et très agréablement présentées.
On peut jouer ici à retrouver les architectures que l'on a découvert en bas, ou bien simplement profiter d'un écran coincé dans une malle de voyage, qui fait le lien entre les photos passées et le présent.

Ici, oui, l'envie de s'aventurer dans l'Uttar Pradesh actuel devient bien plus forte...


Ah, et puis comme souvent, des conférences sont organisées par le musée autour de l'exposition. S'il y en a une à ne pas louper, c'est celle de Kénizé Mourad.
Cette journaliste et écrivain me tient à cœur, car j'ai lu ses ouvrages avec un immense plaisir. De la part de la princesse morte, en particulier, est un ouvrage splendide, qui vous emporte à la fois par ses côtés sentimentaux, ses rebondissements incessants et son immense documentation historique.


Alors si vous êtes libres le jeudi 28, n'hésitez pas, ça vaut le coup !

samedi 9 avril 2011

Tous les soleils.


Oui, je sais, je voulais faire un blog qui ne parle que des expositions parisiennes.
Mais bon, faut pas être sectaire, il y a d'autres choses dans la vie... et puis on est pas mardi!

Alors je voulais juste vous signaler une petite merveille qui fait chaud au cœur : le film Tous les soleils de Philippe Claudel.

J'ai un énorme faible pour le personnage principal, c'est vrai. Et pas (seulement) parce qu'il est italien et qu'il passe la moitié du film à s'engueuler dans cette langue.
Non, surtout parce qu'il est à la fois monstrueusement agaçant, très attendrissant, et qu'on a à la fois envie de lui mettre des baffes et de s'identifier à lui.
Mais en fait, ce qui me fait craquer, c'est sa capacité à être en même temps très malheureux et à chercher le bonheur dans tout.

Bref, un personnage avec une vraie profondeur comme on en fait plus.

Mais tout le film est beau.
Et remuant, aussi.

Les relations père/fille, frères, amis, mère/fille, grand-mère/fille, amours débutants, tout ou presque y est abordé, survolé avec douceur, et sincérité.

Voilà, donc juste pour vous dire que si vous avez le temps, besoin d'un peu de chaleur, n'hésitez pas à faire un petit tour dans votre cinéma favori!